Repenser la catégorie « bidonville ». De Damas à Yangon, les quartiers précaires à l’épreuve des politiques urbaines - IRD - Institut de recherche pour le développement Accéder directement au contenu
Article Dans Une Revue La revue internationale et stratégique Année : 2018

Rethinking the "slum" category. From Damascus to Yangon, precarious settlements under urban policies

Repenser la catégorie « bidonville ». De Damas à Yangon, les quartiers précaires à l’épreuve des politiques urbaines

Résumé

Since slums and precarious settlements have existed, public authorities have been trying to make them disappear and halt their growth. Everywhere, policies, laws, programmes and projects have sought to keep apace of this urbanisation in order to reduce it or integrate it into the formal city. Yet informal urbanisation has expanded at a faster pace. Policies have sometimes had significant effects, but they have neither cleared these settlements nor halted their growth. Why have fifty years of national and international interventions not made it possible to eliminate these settlements or halt urbanisation that fails to comply with laws, regulations and standards? In fact, what needs querying are the underlying assumptions of this question. First, the idea that precarious settlements are the problem. Of course, they do pose problems, above all for their residents, but for many decades they have also been recognised as solutions. Next, the idea that policies intervene in spaces whose existence ontologically preceded them: these settlements are assumed to exist first, and then come the policies to deal with them. Yet, the relationship proves to be more complex. Not only do these settlements constitute the flipside of urban planning and land policies, as they emerge in the spaces where these policies have failings and limitations, but their very existence is the direct consequence of the history of political constructions of categories of the precarious city. In a critical historical perspective, this article proposes a reflection on what constitutes a “slum”, based on the analysis of interactions between urban policies and the inhabitants who do not comply with their projects and injunctions. The category of “slum” is produced, regulated and perpetuated by legal, regulatory and/or administrative decisions that delineate the spaces to be eliminated according to a vision of what the city should be. In addition, the representations on which these policies are founded are at the root of their limitations. Moreover, the sheer variety of these spaces, deemed by public authorities to be “not urban enough”, obliges the authorities to classify them and reserve different fates for them, while the increasing influence of residents’ organisation is spurring public action to evolve. Finally, a diversity of urban policies is today redefining de facto the category of “slum” and encouraging a new way of thinking about the informal city, and more broadly about the urban phenomenon.
Depuis que bidonvilles et quartiers précaires existent, les pouvoirs publics cherchent à les faire disparaître et à en arrêter la croissance. Partout, politiques, lois, programmes ou projets ont cherché à rattraper cette urbanisation pour la réduire ou l’intégrer dans la ville légale. Mais l’urbanisation précaire est demeurée plus rapide. Des politiques ont eu des effets parfois importants, mais n’ont ni résorbé ces quartiers ni stoppé leur développement. Pourquoi cinquante années d’interventions nationales et internationales n’ont permis ni d’éradiquer ces quartiers ni d’enrayer cette urbanisation hors normes ? Il faut questionner les postulats d’une telle interrogation. Tout d’abord, l’idée que les quartiers précaires sont le problème. Ils posent certes des problèmes, surtout aux habitants, mais sont aussi reconnus depuis longtemps comme des solutions . Puis, l’idée que les politiques interviennent sur des espaces qui leur préexistent ontologiquement : d’abord il y aurait des quartiers précaires, ensuite des politiques pour les traiter. Or, la relation s’avère plus complexe. Non seulement ces quartiers constituent un revers de l’urbanisme et des politiques foncières, en s’installant sur les espaces de leurs défaillances et de leur limites , mais leur existence même est la conséquence directe de l’histoire des constructions politiques des catégories de la ville précaire. Dans une perspective historique critique, cet article propose une réflexion sur ce qu’est un « bidonville » à partir de l’analyse des interactions entre les politiques urbaines et les habitants qui ne se conforment pas à leurs projets et injonctions. La catégorie « bidonville » est produite, régulée et perpétuée par des décisions juridiques, réglementaires et / ou administratives qui délimitent des espaces à faire disparaître, selon une vision de ce que doit être la ville. En outre, les représentations sur lesquelles se fondent les politiques sont à la racine de leurs limites. En même temps, la variété de ces espaces, qui seraient « insuffisamment urbains » selon la puissance publique, l’engage à les sérier et leur réserver des sorts différents, et la montée en puissance des organisations d’habitants pousse l’action publique à évoluer. Enfin, une diversité de politiques urbaines redéfinit aujourd’hui de facto la catégorie du « bidonville », invitant à une nouvelle pensée sur la ville informelle, et plus généralement sur l’urbain.

Dates et versions

ird-02007914 , version 1 (05-02-2019)
ird-02007914 , version 2 (06-02-2019)
ird-02007914 , version 3 (20-05-2020)

Identifiants

Citer

Valérie Clerc. Repenser la catégorie « bidonville ». De Damas à Yangon, les quartiers précaires à l’épreuve des politiques urbaines. La revue internationale et stratégique, 2018, 112 (4), pp.139. ⟨10.3917/ris.112.0139⟩. ⟨ird-02007914v2⟩
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