Résumé : Le scandium possède des propriétés remarquables pour de nombreuses applications
industrielles dont (i) la métallurgie des alliages Al-Sc pour l’aéronautique et les équipements
sportifs haut de gamme, (ii) les piles à combustible oxyde solide (« solid oxide fuel cells »,
SOFCs), le scandium pouvant y remplacer l’yttrium, ou encore (iii) les lampes halogènes. Le
marché global du scandium est jusqu’à présent très peu développé (10 à 15 tonnes par an)
mais cet élément est considéré par certains analystes économiques comme un potentiel «
game changer » (via la généralisation des alliages Al-Sc pour l’industrie automobile et/ou le
développement des SOFCs). Il n’existe pour le moment pas de marché organisé pour le
scandium et celui-ci se négocie entre parties privées, essentiellement sous forme d’oxyde
Sc2O3. Le degré de pureté du produit influe fortement son prix (~2000 à 5000$/kg Sc2O3 pour
des teneurs de 99,0 à 99,99% ; USGS, 2018). L'absence de production fiable et le prix élevé
du scandium en limitent pour le moment les applications commerciales. Néanmoins, toute
pérennisation et augmentation de la production de scandium favorisera l’intérêt porte porté à
ce métal par les acteurs industriels, générant vraisemblablement un mécanisme d’autoalimentation
de l’offre et de la demande. La Chine est le principal producteur actuel de
scandium. Celui-ci est essentiellement extrait des résidus miniers des gisements de terres
rares (principalement Bayan Obo).
Le scandium est un élément relativement commun mais qui n’a pas de porteurs spécifiques
et de concentrations naturelles exploitées en tant que telles. Le scandium est de fait
exclusivement exploité en tant que sous-produit de gisements d’uranium, de terres rares, de
titane ou de tungstène. Dans ces gisements, les concentrations en scandium restent assez
modérées (100-200 ppm ou g/t scandium).
Les latérites nickélifères (et cobaltifères) développées sur roches ultrabasiques présentent
des teneurs en scandium allant jusqu’à la centaine de ppm et constituent donc aussi des
cibles potentiellement valorisables pour l’exploitation du scandium, dans la mesure où les
zones enrichies en scandium coïncident avec les zones enrichies ou sub-enrichies en Ni
(±Co). C’est le cas de profils latéritiques notamment aux Philippines, à Cuba et en
République Dominicaine, mais aussi ceux de Nouvelle Calédonie ; les zones enrichies en
scandium surmontent ou recoupent partiellement les zones riches en nickel et cobalt au sein
des profils latéritiques. Dans les latérites développées sur roches ultrabasiques, la plupart
des éléments métalliques contenus initialement dans les faciès sont enrichis par un facteur
10 correspondant à la dissolution totale des silicates. De fait, le scandium qui est
relativement peu mobile en conditions oxydantes est donc vraisemblablement adsorbé ou
intégré dans le réseau cristallin des oxyhydoxydes de fer. Cette évolution a déjà été
proposée sur la base d’analyses en roche totale de profils latéritiques des Philippines, de
Cuba et République Dominicaine, ainsi qu’en Nouvelle Calédonie (Aiglsperger et al., 2016 ;
Ulrich, 2013).
Certains pays dont l’Australie ont initié des recherches systématiques, ainsi que le
développement des méthodes de co-extraction du scandium à partir de minerais nickélifères
d’origine latéritique. En Australie, plusieurs projets sont en cours de développement et
prévoient pour certains une production de Sc à relativement court terme. Les principaux
projets de Sc latéritique en Australie sont (i) Nyngan (Scandium international mining corp.),
(ii) Sunrise (ex projet Syerston, Clean TeQ), (iii) Flemington (Australian mines) et (iv) SCONI
(Australian Mines). Ces projets ciblent des ressources en Sc au sein de latérites
développées sur clinopyroxénite et/ou péridotite. Les latérites développées sur clinopyroxénites contiennent des teneurs très élevées en Sc (typiquement 300 à 600 ppm)
mais ne présente à priori pas de teneurs économiquement intéressantes en Ni et/ou Co. Le
Sc y est donc considéré comme une ressource primaire. Les latérites développées sur
péridotites contiennent des teneurs plus modestes en Sc (100 à 200 ppm) mais sont
associées à des teneurs sub-économiques en Ni et Co. L’exploitation de ces dernières est
alors envisagée dans la perspective d’une covalorisation Ni-Co-Sc. Le projet Nyngan
apparait à ce jour comme le projet le plus abouti, avec la production et la commercialisation
d’alliage Al-Sc à l’horizon 2020.